Sujet : L'articulation des normes écrites de l'ordre juridique interne avec les normes écrites internationales et de l'Union Européenne.
Introduction :
Le corps humain est constitué de plus de 300 articulations. Chaque articulation ayant pour but de servir de liaison entre deux os et ainsi de permettre le mouvement. Considérant que l’os du poignet serait les normes écrites de l’ordre juridique interne et l’os du bras les normes écrites de l’ordre juridique externe, l’articulation entre les deux résulterait de l’existence d’une hiérarchie des normes. Une norme écrite est une règle qui du fait de son origine (du texte dont elle provient) et de son caractère général et impersonnel constitue une source de droits et d’obligations juridiques. L’ensemble des normes écrites (Constitution, loi, règlement) qui à un moment défini et dans un Etat donné établissent à l’intérieur de cet Etat le statut des personnes privées et publiques et leurs relations constitue ce que l’on appelle l’ordre juridique interne, ou ordonnancement juridique interne. Interne par opposition à l’ordre juridique externe qui est lui composé de l’ensemble des normes écrites de l’ordre juridique international, et pour les pays membres de l’Union Européenne, des normes écrites du droit communautaire. Les normes écrites de l’ordre juridique international sont les traités internationaux et les conventions internationales. Les normes écrites de l’ordre juridique communautaire, qui peuvent provenir du droit communautaire originaire (les traités constitutifs de l’Union Européen, et les traités venus les compléter) ou bien du droit communautaire dérivé (actes pris par les institutions communautaires : directives et règlements). Suivant différentes modalités, ces différentes normes écrites appartenant à l’ordre juridique internationales peuvent être directement applicables dans le droit interne des Etats signataires. C’est pour cette raison qu’il est nécessaire qu’existe un lien entre les normes écrites de l’ordre juridique interne et celles de l’ordre juridique externe. Ce lien, c’est la hiérarchie des normes, fondée par le juriste austro-américain Hans Kelsen en 1920, qui l’assure. Elle permet ainsi de savoir quelle est l’autorité normative de chaque norme. Mais il se pose un problème. En effet dans la hiérarchie des normes d’Hans Kelsen, la norme suprême est la Constitution, elle se situe tout en haut de la hiérarchie, et de ce fait toutes les normes qui lui sont inférieures (les traités internationaux et normes de droit communautaire, les lois et les règlements) doivent lui être subordonnées. Or par son arrêt Costa contre Enel en 1964, la Cour de Justice Européenne a affirmé le principe de primauté du droit communautaire sur celui des Etats membres de l’Union Européenne. Ce qui donc remet en question la supériorité de la Constitution, qui est une norme national propre à chaque Etat membre … On pourrait également évoquer l’Article 55 de la Constitution Française de la V° République qui appuie également la supériorité des traités internationaux sur les normes de droit interne. Donc non seulement, les normes écrites de l’ordre juridique externe doivent primer sur les normes de droit interne que sont les lois et règlements, mais aussi sur la Constitution, qui devrait pourtant être, selon la hiérarchie des normes, la norme suprême ! On peut donc se poser la question de la pertinence de la hiérarchie des normes. En fait, cette hiérarchie des normes reste tout à fait pertinente dans la mesure où les modalités d’adoption et d’application des normes écrites de l’ordre juridique externe permettent de préserver les normes écrites de l’ordre juridique externe (I) et que la subordination des lois et règlements à l’ordre juridique externe est tout à fait justifiée (II).
I) Modalités d’adoption et d’application des normes écrites de l’ordre juridique externe :
A) Suprématie préservée de la Constitution sur les normes écrites de l’ordre juridique international :
• Les traités internationaux ne sont pas toujours applicables en droit interne, ils doivent concernés également le droit privé pour pouvoir être invoqué par des justiciables au cours de procès. S’ils ne concernent que le droit public, ils ne concernent que les relations entre Etats, ou entre Etats et organisations internationales, et donc ne sont pas invocables par des particuliers.
• En tous les cas, les traités doivent être ratifiés par le pouvoir exécutif, en l’occurrence le président de la République. Or si les traités ne sont pas conformes à la Constitution, cette dernière doit être révisée avant ratification du traité. Ce qui signifie, non pas que la suprématie de la constitution est amoindrie, mais bien au contraire, que l’on n’adopte pas un traité à la légère car il implique une révision de la Constitution, la norme écrite nationale suprême …
• Article 55 de la Constitution Française : ainsi il ne faut pas voir dans cet article une diminution de la suprématie de la Constitution, mais bien au contraire un moyen de ne pas adopter à la légère n’importe quoi comme traités …
B) Les modalités d’applications des normes écrites de l’ordre juridique de l’Union Européenne :
• Deux types de normes peuvent être prises par les institutions communautaires (Commission Européenne, Parlement Européen et Conseil de l’Union Européenne). Il s’agit des directives européennes et des règlements européens.
• Une directive européenne n’est pas directement applicable dans l’ordre juridique interne. Elle doit être transposée en droit interne par une loi ou un règlement avant d’être applicable. Donc finalement, une directive européenne s’insère tout simplement dans le droit interne, sans le contredire. D’autant plus que la loi ou le règlement dont le but est de transposé la directive doit, au nom de la hiérarchie des normes, être conforme à la Constitution.
II) Subordination justifiée des lois et règlements à l’ordre juridique externe :
A) Les justifications de la Cour de Justice Européenne :
• 1964, arrêt Costa contre Enel : la CJE a justifié le principe de primauté du droit communautaire sur celui des Etats membres par trois arguments (principaux) .La primauté du droit communautaire procède :
- De son intégration à l’ordre juridique interne des Etats :
- Du transfert d’attribution effectué par les Etats membres vers la Communauté Européenne.
- De la nécessité de garantir une application uniforme du droit communautaire.
B) Le principe de subsidiarité :
• Définition du principe : principe qui vise à privilégier le niveau inférieur d'un pouvoir de décision aussi longtemps que le niveau supérieur ne peut pas agir de manière plus efficace.
• Selon ce principe, l’Union n’agit –sauf pour les domaines de sa compétence exclusive– que lorsque son action est plus efficace qu’une action entreprise aux niveaux national, régional ou local par les États membres.
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